Nous étions sur le point de réaliser un rêve d’enfance : voir des gorilles sauvages pour la première fois dans leur milieu naturel. Pour nous, comme pour la plupart des sept personnes qui nous accompagnaient, voir les gorilles dans la nature africaine est un rêve d’enfance. J’étais toute tremblante d’excitation – ou de fatigue, parce que nous venions de passer une heure à grimper la montagne où se trouvaient les gorilles. Alors que je me disais que c’était la dernière fois que je croyais un Congolais qui me disait que ‘ce n’est pas loin’, un de nos guides nous fit signe de mettre nos masques buccaux. Quelques pas plus loin, je l’ai vu : un énorme animal noir assis dans les buissons.
Le gorille était énorme. Et si proche! Je venais de rencontrer Bonane, le dos-argenté du groupe que nous étions venus visiter. Alors que nous avions entendu les femelles et jeunes du groupe s’enfuir à notre approche, Bonane ne semblait pas avoir peur de nous. En fait, nous ignorant superbement, il continuait à manger, choisissant les feuilles tranquillement. Il ne bougea même pas quand les gardes se mirent à couper les branches autour de lui avec une machete afin que nous puissions mieux le voir.
Pendant quelques minutes, tout le monde regarda Bonane en silence. Nous étions, littéralement, bouche-bée. Il est étrange d’observer un animal qui est aussi humain. J’avais l’impression d’être impolie à le fixer de la sorte. Et pourtant, aucun de nous ne pouvait le quitter du regard. Petit à petit, nous avons sorti nos appareils photos et nous sommes mis à tirer cliché sur cliché de Bonane. Ennuyé par notre présence, ou simplement à la recherche d’une meilleure nourriture ou des membres de sa famille, Bonane se leva promptement et disparut dans les fourrés. Grâce à l’aide des gardes, nous le suivirent jusqu’à un arbre où il s’était perché. Tranquillement assis au sommet de l’arbre, il cassait les branches une par une dans un bruit infernal pour atteindre les feuilles les plus tendres. Une vraie démonstration de force.
Nous sommes restés un peu plus d’une heure avec Bonane. La plupart du temps, nous l’avons regardé manger des feuilles, de l’écorce, des fruits. Un de nos moments préférés a été quand nous l’avons vu descendre de l’arbre, son corps tendu. Nous avons tous retenu notre souffle. Il y avait aussi ces moments où son regard croisait le nôtre. Évidemment, nous aurions voulu voir les autres members de sa famille, mais Bonane sera toujours le premier gorille que nous avons observé dans la nature : inoubliable.
Pourquoi visiter le parc national de Kahuzi-Biega
Il y a peu d’endroits au monde où il est possible d’observer les gorilles dans leur milieu naturel. Les plus connus de ces endroits sont Le Parc National des Volcans au Rwanda et le Parc National des Virunga eu Congo. Dans ces deux parcs, il est possible de voir des gorilles des montagnes (Gorilla beringei beringei), les plus duveteux des deux sous-espèces de Gorilles de l’Est. Le Parc National de Kahuzi-Biega n’est pas aussi connu mais est le meilleur endroit pour voir les gorilles de Grauer (Gorilla beringei graueri), les plus gros de tous les gorilles et l'autre sous-espèce de Gorilles de l’Est. Ces gorilles n’existent que dans l’Est du Congo et sont très rares!
Un autre avantage du parc de Kahuzi-Biega est que l’entrée y est (beaucoup) moins chère qu’au Rwanda et même au Virunga. Malheureusement, parce que le parc est aussi moins touristique, il offre également moins d’installations. Il est possible de louer une tente ou une cabine dans le parc, mais il n’y a pas de restaurant ou de magasin dans les environs. Personnellement, nous avons trouvé que la meilleure option était de passer la nuit dans la ville de Bukavu et de nous lever tôt pour visiter les gorilles. En effet, la ville est située à une heure du parc juste à côté de la frontière Rwandaise, le long du lac Kivu et offre de très belles vues sur le lac ainsi que beaucoup d’options pour bien manger et dormir.
Des gorilles habitués ne sont plus tout à fait sauvages
Frederik et moi n’avons pas pour habitude d’aller voir des animaux habitués, tout simplement parce que nous aimons chercher les animaux sauvages dans la nature. Même si ça veut dire que nous devons en général nous limiter à une rencontre éclair avec l’animal. Malheureusement, il est impossible de voir un gorille tout à fait sauvage. Comme nous en avons fait l’expérience il y a quelques semaines, les gorilles sauvages fuient et se cachent bien avant que nous puissions les voir. C’est pourquoi visiter les gorilles qu’on a entraînés à tolérer la présence humaine, habitués comme ceux de Kahuzi-Biega, est le seul moyen de les voir ailleurs que dans les zoos. Pour être honnête, nous avons parfois eu l’impression que nous dérangions Bonane. Nous étions si proches de lui ! Certains étaient même trop proches à notre goût. Nous aurions aussi souhaité que notre groupe ne soit pas aussi grand. Mais malgré cela, nous sommes reconnaissants d’avoir eu la chance de pouvoir passer une heure en compagnie de ce gentil géant et regarder son visage avec toutes ses expressions. C’était une expérience incroyable que nous espérons pouvoir vivre encore. Et avec un peu de chance, Bonane nous présentera alors à toute sa famille !
Les gorilles habitués sont des animaux sauvages. Ils vivent et font ce qu'ils veulent, ils sont tellement habitués aux gens qu'ils vous voient comme un arbre ou une créature de la forêt. J'ai vu trois fois des gorilles qui n'étaient pas habitués. Une fois dans le Parc National de la Lope au Gabon, une fois dans le Parc National de Lobeke au Cameroun et une fois sur une route forestière au Cameroun près de Libongo. À aucune de ces occasions, les gorilles ne se sont enfuis, mais ils étaient assez détendus, ce qui nous a permis d'avoir une bonne vue sur eux et de les observer pendant un moment. Nous avons également vu des gorilles habitués en RCA dans le parc national de Dzangha Ndoki, ce qui offrait une meilleure vue sur les gorilles, mais n'était pas très différent de l'observation des gorilles complètement sauvages. L'avantage pour les gorilles qui s'habituent est qu'ils encouragent leur protection grâce à des revenus touristiques garantis (les touristes sont beaucoup plus disposés à dépenser de l'argent pour une expérience garantie que fortuite). Je vous recommanderais de consulter les parcs nationaux mentionnés si vous avez le temps et l'argent pour eux.